458                         JOURNAL DE HENRI III.
le dixiéme jour de novembre. — Or ce jour-là, dit-il, la Reine mere reçût des lettres de madame d'Au­male (0. Le sujet, je ne le scai pas : bien sçais-je que tout aussi-tôt elle envoya un des siens au Roy, pour le prier d'envoyer vers elle un de ses confidens. Il me fit l'honneur de me donner cette charge, arrivé, elle me commanda en ces mémes termes : a Dites au Roy « mon fils que je le prie de prendre la peine de des-« cendre en mon cabinet, pour ce que j'ai chose à lui « dire qui importe à sa vie, à son honneur et à son cc Etat. » Ayant fait ce rapport au Roy, il descend sou­dain, commandant à un de ses plus favoris et à moi de le suivre. La Reine mere y étoit déjà; et s'étant mis tous deux aux fenêtres, ce favori et moi nous nous rangeâmes au bout du cabinet.
« Ce conseil fut la cause des inquiétudes qui travail­loient si fort le duc de Guise pendant qu'il dura. Je ne vous puis djre quels furent les propos qu'ils tinrent ensemble,'pour n'en avoir entendu aucun; mais bien vous puis-je assurer que, sur leur séparation, elle pro­féra assez haut ces paroles : «Monsieur mon fils, il s'en « faut dépêcher : c'est trop long-tems attendu. Mais « donnez si bon ordre, que vous ne soyez plus trompé « comme vous le futés aux barricades de Paris. »
Le Roy, se voyant confirmé en son premier dessein par l'avis de la Reine sa mere, fait son projet, et se dispose à l'exécuter. Et ayant déreconnu que le duc de Guise s'étoit pris à l'amorce de sa dévotion, à la­quelle toutefois et à la solitude son humeur naturelle
(U Madame d'Aumale: Elle donnoit avis d'une entreprise du duc de Guise contre la personne du Roy, et le duc de Mayenne méme en avoit averti Sa Majesté.
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